mardi 30 mars 2010

Les leçons de l'investisseur: Se comporter comme un directeur-gérant impatient est néfaste à la longue

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L'un des pièges lorsqu'on débute en bourse, c'est de développer le besoin de transiger, simplement pour sentir la "drive" de transiger, la sensation de réaliser ce qu'on croît être un bon coup.

Si on ne possède pas de liquidités pour assouvir notre soif de transiger, qu'est-ce qu'on fait? On se tourne vers la possibilité de "faire des échanges", comme on dit en langage de hockey. Et si je vendais le titre de cette jeune recrue dont le développement semble piétiner et que j'obtenais en échange ce vétéran qui a fait ses preuves et qui pourrait me donner rapidement un meilleur rendement... Ou l'inverse, je pourrais me débarrasser de ce vétéran assoupi et obtenir cette recrue qui a le potentiel d'une super-star... On devient un directeur-gérant impatient, prêt à chambouler son équipe pour le seul plaisir de bouger et de se sentir utile.

À mes débuts en bourse, après quelques mois, je me suis retrouvé dans cette situation: je n'avais plus de liquidités, mais en étudiant les marchés je voyais plein de candidats au potentiel d'un Wayne Gretzky et d'un Mario Lemieux qui ne demandaient qu'à être repêchés. Je décidai alors de passer à l'action et je fis deux échanges dans une même journée: j'ai montré la sortie à Exfo Electro-Optical (EXF-TSX) et à JDS Uniphase (JDSU-NYSE) et j'ai obtenu en retour Corning (GLW-NYSE) et PerkinElmer Inc (PKI-NYSE). Il s'avéra que ce fut, sur le coup, un excellent échange, car mes deux acquisitions qui étaient au plancher au moment de la transaction, semblèrent complètement revigorées dès leur arrivée dans leur nouvelle équipe! Ils remplirent les buts séance après séance, alors que mes deux "ex" se retrouvèrent pratiquement dans la ligue Américaine...

Cette chance du débutant dont avait bénéficié le jeune directeur-gérant que j'étais, me monta rapidement à la tête. Pourquoi m'arrêter là, puisque j'avais le flair d'un Sam Pollock! Je me mis à multiplier les échanges, je cédais des recrues au potentiel intéressant que j'avais pris des mois à dépister dans les mineures, pour les troquer pour le premier joueur venu qui me semblait leur être supérieur par une coche. Il arriva ce qui devait arriver: les échanges suivants furent nettement moins intéressants, jusqu'au jour où j'échangeai, sans le savoir, celui qui aurait pu devenir mon joueur étoile, celui qui m'aurait mené à la coupe Stanley: Algoma Steel. J'ai déjà raconté cette triste transaction dans un billet antérieur.

Le directeur gérant d'un club de hockey quand il transige, n'a pas à payer des frais de transaction ou à déclarer des gains de capitaux imposables, privilège que nous n'avons pas, nous investisseurs. L'échangisme à outrance en bourse est donc une pratique qui peut s'avérer coûteuse et risquée, et qui vous amènera inévitablement à vivre de douloureux regrets quand vous apercevrez un jour ce joueur que vous aviez découvert dans un aréna perdu dans un quelconque bled, briller maintenant de tous ses feux dans l'équipe adverse, installé au sommet de la liste des pointeurs de la ligue Nationale...
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dimanche 7 mars 2010

Un an déjà

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Il y a un an, le 6 mars 2009, les marchés boursiers étaient plongés dans la tourmente de la crise des subprimes et des PCAA et de la possibilité d'un effondrement du système financier mondial. Ce jour-là, le S&P 500 touchait un creux durant la séance: 666 points!

Un an plus tard, l'indice est remonté à 1139 points, un redressement de 71% en douze mois. Bien sûr, les investisseurs vivaient alors des heures d'angoisse, pourtant ces journées de panique étaient une occasion en or de faire le plein à des coûts dérisoires. Une occasion qui n'est pas près de se représenter de si tôt.

À preuve, voici quelques titres qui ont été mentionnés sur ce blog, qui ont fait des bonds vertigineux depuis ce creux de la première semaine de mars 2009, en douze petits mois:

Avis Budget Group (CAR-NYSE): +2856%
Tuesday Morning (TUES-NASDAQ): +1269%
Sanmina SCI Corp (SANM-NASDAQ): +1230%
Office Depot (ODP-NYSE): +1155%
Radian Group (RDN-NYSE): +1008%
Garda World (GW-TSX): +900%
Gannett Corporation (GCI-NYSE): +780%
Wyndham Worldwide Corp (WYN-NYSE): +767%
Bank of Ireland (IRE-NYSE): +742%
Rhodia (RHAYY-OTC): +739%
Ford (F-NYSE): +688%
AmeriCredit Corp (ACF-NYSE): +646%
Barclays PLC (BCS-NYSE): +565%

Mise en garde: ce n'est que mon point de vue de simple investisseur, ce ne sont pas des recommandations, à vous d'y regarder de plus près ou à vous adresser à un conseiller financier si ces titres vous intéressent. Les dividendes des titres américains ou de type ADR ont un traitement fiscal différent de ceux des compagnies canadiennes. Il faut s'informer avant d'investir!

mardi 2 mars 2010

Les leçons de l'investisseur: ne pas signer un contrat en mandarin, à moins de bien connaître la langue

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Le cimetière des petites entreprises québécoises aux promesses démesurées s'est enrichi d'une nouvelle pierre tombale la semaine dernière, celle de la biotech ConjuChem (CJB-TSX). Elle s'est en effet placé sous la protection de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies (LACC), pour procéder à une restructuration de son capital. Et comme on sait ce que ce genre de restructuration laisse comme part pour les anciens actionnaires ordinaires, aussi bien dire que pour eux, c'est R.I.P..

ConjuChem a connu son heure de gloire il y a quelque années, alors que certains entrevoyaient le jour où elle ferait une percée majeure dans le traitement du diabète. Moi je n'ai mordu que tout légèrement à l'hameçon, mais un de mes amis y a mordu à pleine dents, laissant $20,000 dans l'aventure. Il a été envoûté par ce titre et ses promesses de grand soir où il passerait à la caisse, une sorte de fixation sur un mirage. Heureusement pour lui, il a eu une autre fixation nettement plus heureuse sur une autre compagnie, Garda World, qui a connu une forte remontée depuis un an, ce qui fait qu'il ne s'en tire pas trop mal en bout de ligne. Il faut cependant se méfier de ce type d'investissement concentré sur une poignée de titres, à moins de connaître chacun d'eux dans leurs moindres coutures.

Ce qui m'amène à parler d'un conseil de notre bon vieux Warren Buffett: investissez dans le type d'entreprise que vous comprenez. Imaginez, le plus grand investisseur de tous les temps, ami personnel de Bill Gates, n'a jamais investi un sous dans Microsoft pour la simple raison qu'il avoue ne rien comprendre à l'informatique. Warren Buffett n'investit pas dans une entreprise qu'il ne comprend pas.

ConjuChem Biotechnologies sur son site affirmait:

ConjuChem élabore des médicaments de prochaine génération à partir de peptides thérapeutiques uniques et à action prolongée. L'ensemble des composés de ConjuChem s'appuient sur les plateformes de bioconjugaison appelées complexe d'affinité-pharmacothérapeutique (DACMC) et conjuqué préformé-complexe d'affinité-pharmacothérapeutique (PC-DACMC). Appliquées à un peptide spécifique, ces plateformes permettent d'élaborer de nouveaux médicaments aux effets thérapeutiques identiques à ceux du médicament d'origine, mais dont la durée d'activité est beaucoup plus longue et les profils d'innocuité améliorés.

Ça vous dit quelque chose? Moi pas. Par contre, pour Garda, c'était plutôt simple à comprendre: des camions blindés qui transportent de façon sécuritaire des devises, de la monnaie, des chèques et autres objets de valeur...

Cette compréhension des activités de l'entreprise est une première condition à l'investissement. Bien sûr l'analyse ne s'arrête pas là et même si l'activité est claire, ses états financiers et son marché peuvent être fort complexes à comprendre. Ce n'est qu'un point de départ mais il est essentiel. Alors que "les plateformes de bioconjugaison appelées complexe d'affinité-pharmacothérapeutique (DACMC) et conjuqué préformé-complexe d'affinité-pharmacothérapeutique (PC-DACMC)", pour moi, c'est comme lire un contrat en mandarin!

Mettre ses sous dans une entreprise sans pouvoir expliquer clairement ce qu'elle fait, est un très mauvais point de départ qui risque de vous amener un jour à visiter un cimetière.
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