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Mon expérience m’amène à penser qu’il y a beaucoup plus des ces entreprises sérieusement malades qui ne s’en remettront pas, plutôt que l’inverse. Cependant, lorsqu’on identifie une entreprise qui a le potentiel pour se sortir du pétrin dans lequel elle se trouve, on détient là un placement dont le rendement pourra être fort rémunérateur. Comme séparer le bon grain de l'ivraie?
LE BILAN FINANCIER
L’élément clef à vérifier, c’est le bilan financier : quelle est la nature du passif, quelle est la part de l’avoir des actionnaires (equity) par rapport aux dettes de l’entreprise? Quelle a été l’évolution entre ces deux composantes du passif au cours des derniers trimestres et des dernières années? Le ratio dettes totales/avoir des actionnaires est facile à vérifier dans le bilan financier; certains vont se fixer un ratio 1/1, au dessus duquel ils n’iront pas. Cela peut être trompeur, certains entreprises rentables ont des dettes plus élevées que l’avoir des actionnaires mais génèrent des profits substantiels : elles utilisent les emprunts comme un levier efficace. Cependant, vous devez vous fixer une limite d’endettement, au dessus de laquelle vous n’irez jamais.
Là ou ça se complique encore davantage pour le simple investisseur, c’est dans l’analyse de la dette. Quelle est la nature des emprunts, quelles en sont les conditions et quels sont les échéanciers de remboursement? Est-ce que l’entrée d’argent au cours des prochains trimestres et années sera suffisant pour remplir les obligations de la dette? Sinon, on pourrait se retrouver forcé d’aller en refinancement, ce qui pourrait être particulièrement coûteux et difficile à obtenir dans l’état actuel du marché du crédit, échaudé par la crise des « subprimes ». Méfiez-vous des possibilités de « debt squeeze » : pour les éviter, il faut donc fouiller davantage le passif de l’entreprise et sa capacité à générer des profits et du « cash », pas se limiter aux simples ratios d’endettement.
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Au Québec, Tembec (TBC) est un bon exemple d’une entreprise qui n’était pas une bonne occasion d’achat quand les premiers symptômes de la maladie se sont présentés au début 2005 : une dette qui grandissait aux dépens de l’avoir des actionnaires dans un secteur en difficulté, où il était pratiquement impossible de générer des profits qui auraient permis de redresser la situation. Tembec a restructuré son capital cette semaine, les actionnaires se sont retrouvés avec 5% des nouvelles parts de l’entreprise. Et ça aurait pu être pire…
Le seul moyen pour une entreprise de sortir du bourbier de l’endettement est de générer des profits et surtout, d'importants flux de trésorerie libres (free cash flow). Sinon, c’est la spirale irréversible vers la recapitalisation aux dépens des actionnaires actuels.
Prochaine chronique : les flux de trésorerie